La voix soul de Talin Maas, portée par le jeu feutré de la pianiste Marine Garcia, nous donnent à écouter un duo tout en douceur. On se laisse porter sans effort de l’univers soul/R’n’B des compositions de Talin à la dépaysante nostalgie d’une chanson arménienne.
Bonjour Talin et Marine, pouvez-vous vous présenter un peu à nos auditeurs ?
Talin : Je viens d’Allemagne où j’ai grandi et vécu pendant toute ma jeunesse. J’ai ensuite fait un stage à Marseille pendant deux mois après le bac qui m’a donné envie de m’installer en France et j’ai fait d’abord des études en langues à Paris, avant de me réorienter vers la musique. J’ai toujours fait beaucoup de musique dans des groupes etc. mais du coup j’ai repris des études musicales à la fac et au conservatoire à Toulouse avant de m’installer à Marseille il y a trois ans, une ville que j’ai toujours admirée et dans laquelle j’ai toujours voulu m’installer pendant un moment. J’ai rencontré rapidement des musiciens ici mais le Covid a mis tout en pause. Depuis deux ans je chante maintenant dans plusieurs projets et j’ai notamment lancé mon projet personnel entourée de quatre supers musiciens et musiciennes pour lequel je compose et j’écris. On va bientôt faire notre toute première date au Télégraphe à Toulon, j’ai très hâte de présenter tout notre répertoire !
Marine : J’ai commencé le piano à l’âge de 8 ans au conservatoire d’Istres en classique, puis une année plus tard je suis rentrée dans la classe jazz. Après avoir passé mon CEM en jazz / musiques actuelles, j’ai intégré le cursus de l’IMFP à Salon de Provence. Là-bas j’ai fait beaucoup de rencontres et j’ai joué dans plusieurs projets. Et pour ce qui est de la guitare j’ai un papa guitariste qui m’a un peu appris depuis petite, mais je n’ai jamais vraiment travaillé cet instrument sauf pour la chanson arménienne qu’on a joué pour l’occasion.
Comment vos routes se sont-elles croisées? Aviez-vous déjà joué ensemble avant cet épisode?
T : Marine joue dans mon projet personnel depuis cette année. C’est un autre ami pianiste qui m’a parlé d’elle quand je cherchais un ou une pianiste et elle a toute de suite dit « oui » et j’étais très heureuse de sa réponse, elle régale les oreilles !
M : Je connaissais Talin de vue parce qu’on a beaucoup de copains musiciens en communs, et un jour elle m’a appelée pour me proposer de rentrer dans son projet de compos (j’étais super contente qu’elle fasse appel à moi !)
Quelle est l’histoire derrière les deux compositions que vous nous proposez?
J’ai écrit « Rain » cet été, quand on était en pleine canicule et que je devenais folle dans mon appartement en plein centre-ville, il n’y avait pas d’air pour respirer et penser clairement. J’étais angoissée et presque paralysée par cette chaleur, comme beaucoup de gens. La chanson parle de cette problématique du réchauffement climatique, mais d’un point de vue personnel : comment en tant qu’individu je vis ses conséquences. Il y a aussi une autre dimension plus personnelle dans la chanson, parce que l’été qu’on vient de passer était une période de changement pour moi : j’ai fait beaucoup de choses, des nouvelles choses aussi, j’ai beaucoup écrit, et je prévois des choses pour l’avenir. C’est excitant mais parfois aussi un peu stressant, parce qu’on ne peut pas prévoir l’avenir comme on voudrait et je veux parfois y aller trop vite ou alors au contraire, je trouve que je suis trop lente et que je laisse trainer certaines choses. La pluie dont je parle dans cette chanson, je la vois aussi comme quelque chose d’apaisant pour m’aérer les idées et me calmer l’esprit de temps en temps.
L’autre chanson, « Good Enough », rejoint un peu cette idée-là de se libérer de la pression qu’on se met sur soi-même, souvent causée par des attentes et exigences extérieures, et de se contenter avec soi-même dans le présent.
Comment avez-vous procédé pour les arrangements ?
J’avais envie de faire des chansons très R’n’B/soul cet été pour retrouver un peu mes goûts de l’adolescence. Il y avait d’abord les accords, auxquels j’ai ajouté la mélodie et ensuite les paroles en dernier. J’ai montré ça à Marine et on a trouvé ensemble ses voix de chœurs et elle s’est ensuite approprié les accords avec sa façon d’accompagner. On a choisi ces deux morceaux du répertoire de mon projet personnel parce que ce sont un peu les seuls qu’on peut jouer à deux et qui marchent en piano-voix sans que les autres instruments manquent.
Y’a t’il des artistes qui vous inspirent en particulier ?
Comme je disais, je suis un peu retournée à mes goûts d’adolescence cet été et j’ai écouté des artistes R’n’B, notamment Cleo Sol que je trouve très inspirante dans sa façon d’écrire et de chanter. Sinon, plus généralement je suis très fan de Hiatus Kayote, Michael Mayo, Ego Ella May, Yazmin Lacey et tous ces artistes qui mélangent la soul et le jazz.
Talin, quelle importance revêt pour toi la chanson arménienne qui conclut cet épisode ?
Ma mère est arménienne et j’ai donc grandi entre les cultures allemande et arménienne. Cela faisait longtemps que j’avais envie de chanter en arménien mais je n’ai jamais vraiment osé. Je suis tombée amoureuse de cette chanson du grand compositeur Arno Babajanyan qui sonne un peu comme une comptine avec une mélodie belle et touchante. Elle est plus accessible aux oreilles plutôt habituées à la musique occidentale que d’autres chansons traditionnelles qui puisent vraiment plus dans les gammes et sonorités de la musique arménienne. Cela me paraissait alors la chanson idéale pour me lancer dans cette envie de chanter en arménien.
Pourquoi avoir préféré la guitare au piano pour cette chanson ?
J’avais trouvé un bel arrangement sur Youtube de la chanteuse Lucy Yeghiazaryan et du guitariste Eric Zolan. Je l’ai montré à Marine et elle, qui est surtout pianiste, a tout de suite eu envie de le relever à la guitare pour se donner un nouveau défi. La guitare amène peut-être encore plus le côté intimiste et pur de la chanson. Elle a une certaine simplicité très touchante qui se traduit mieux à la guitare je trouve.
Vos trois albums d’île déserte ?
T :
- Rose in the Dark de Cleo Sol
- Case Study 01 de Daniel Caesar
- Choose Your Weapon de Hiatus Kayote
M :
- Calambre de Nathy Peluso
- Around the Fur de Deftones
- Choose Your Weapon de Hiatus Kayote
Un dernier mot pour finir?
Merci beaucoup pour votre invitation, on a pris beaucoup de plaisir à réfléchir au format duo et à choisir et adapter notre répertoire en fonction. On se sent surtout super chanceuses d’avoir pu faire cette captation avec vous juste quelques heures avant la naissance d’Octave !